Arpentage – Lecture collective

Arpentage – Lecture collective

L’arpentage est un outil dont la théorisation est attribuée à Jean-Claude Lucien et Joffre Dumazedier de l’association Peuple et culture, mais qui était certainement utilisée dans les cercles ouvriers dès la fin du 19e siècle. Son but est d’amener à lire collectivement un essai politique ou un livre scientifique et de partager les réflexions de chacun·e à son propos.

Concrètement, un livre suffit à tout un groupe car il est divisé et déchiré (proprement) en autant de parties que de participant·es. Un temps de lecture est donné lors duquel chacun·e lit sa partie pour elle·lui, dans son coin, en prenant des notes ou non.

Quand tout le monde a finit (ou pas) on se regroupe et chacun·e dispose d’un temps de parole pour résumer sa partie, dire ce qu’elle en a compris, pas compris, faire des liens avec son vécu, avec d’autres œuvres théoriques, et ses émotions, voire peut en tirer des idées et enseignements pour nourrir une lutte. Ce temps est respecté par les autres, qui ne coupent pas la parole.

Quand tout le monde a parlé ainsi, on passe à une discussion libre et modérée (un·e animateurice veille aux prises de paroles) durant le temps restant.

L’objectif n’est pas de produire une synthèse du livre, ni de tout lire ou de tout comprendre. Il s’agit au minimum d’amener à la lecture des personnes à qui des ouvrages théoriques font peur et de donner un espace où peuvent s’exprimer des ressentis de lecture. Il s’agit de montrer, par le partage des expériences, que le contenu des livres n’est pas seulement celui des livres mais est connecté à nos vies.

L’idéal est aussi de montrer en quoi nos compréhensions d’un livre peuvent nous aider dans nos luttes sociales (au sens très large, incluant la promotion de l’esprit critique et de la culture scientifique dans le cas de notre association). Le livre choisi n’a pas forcément à être orienté vers une lutte, c’est aux participant·es de se saisir du propos pour lui trouver un potentiel émancipateur.

Pourquoi déchirer le livre ? Historiquement, cela vient certainement du fait que tout le monde ne pouvait pas se procurer des livres. La division d’un exemplaire unique était nécessaire au partage de son contenu. Aujourd’hui ça peut encore être le cas, mais l’intérêt principal réside d’une part dans la désacralisation de l’objet et d’autre part dans la nécessité de l’échange pour pouvoir appréhender le propos du livre dans sa globalité. Si chacun·e n’a entre les mains qu’un morceau de livre, il faut écouter les autres pour accéder au reste !

Ce n’est pas une destruction du savoir mais sa diffusion. Même l’objet n’est pas détruit car les feuillets sont remis en place après l’arpentage et le livre reste lisible.

Arpentage et pensée critique

Beaucoup d’ouvrages se revendiquent aujourd’hui de la pensée critique, et plus encore font effectivement de la pensée critique sans s’en revendiquer. D’autres ouvrages traitent de sujets scientifiques sans forcément les lier à une pensée critique.

Les arpentages que notre association se propose d’animer peuvent se nourrir de tous ces ouvrages. L’objectif est toujours le même pour nous : comment tirer, collectivement, un propos émancipateur et critique de nos lectures.

PETIT GUIDE de l’arpentage en BD – Cliquez sur l’image !

Livres arpentés à ce jour

Q comme complot – Comment les fantasmes de complot défendent le système
Wu Ming 1

Cet essai, écrit par une auteure italienne d’avant-garde, interroge les narrations complotistes et est un véritable manifeste pour la littérature – une littérature politique, qui nous donne à penser le monde dans toute sa complexité. Une réflexion sur la pensée conspirationniste, qui prend appui sur les romans d’Umberto Eco (et d’autres!) pour décrypter le phénomène QAnon et ses dérivés ; mais également une réflexion politique et sociale ! En quoi notre système politique et nos imaginaires fictionnels permettent à ces narrations alternatives de s’épanouir ?

Se vouloir du bien et se faire du mal – Philosophie de la dispute
Maxime Rovere

Pourquoi et comment échouons-nous à communiquer ? Comment affronter le désaccord de manière constructive ? Ce texte, entre philosophie et récit de vie, résonne aussi avec des préoccupations sociales très actuelles. Dans une époque où personne ne semble plus vouloir écouter ni comprendre son prochain, cette philosophie optimiste de la dispute pourrait bien nous redonner des outils pour penser et communiquer plus sereinement.

Partager